Moore
Bulletin de mars 2020

En vertu de la LIR, les dépenses d’intérêt peuvent être déduites d’un revenu d’entreprise ou d’un revenu de biens si certaines conditions sont satisfaites :

  • Il doit exister une obligation légale de payer les intérêts. (Dans la plupart des cas, on s’assure ainsi que le bénéficiaire des intérêts est tenu de les déclarer comme revenu.) Une obligation de payer des intérêts qui serait conditionnelle ou incertaine ne serait pas acceptée. Cependant, l’obligation légale peut découler d’un accord verbal – pourvu que l’ARC ou la CCI soit convaincue que l’obligation existait réellement (par exemple, Conrad Black c. La Reine, 2019 CCI 135).
  • Le montant déduit doit être raisonnable. Si le prêt fait intervenir des personnes ayant un lien de dépendance (par exemple, de membres de la famille) et que le taux payé est supérieur à un taux d’intérêt commercial accessible, l’ARC refusera normalement la déduction de l’excédent.
  • L’intérêt est payé sur de l’argent emprunté servant à gagner un revenu assujetti à l’impôt. L’ARC et les tribunaux exigent en général que l’argent puisse être ainsi retracé. Il ne suffit pas de dire que, si vous n’aviez pas emprunté l’argent, vous auriez dû vendre d’autres actifs produisant un revenu. Vous devez démontrer que l’argent que vous avez emprunté a été utilisé directement pour un investissement dans une entreprise ou des biens qui peuvent produire un revenu imposable.
  • En revanche, l’intérêt peut être payé sur le solde non réglé du prix d’achat d’un bien qui est utilisé aux fins de tirer un revenu d’une entreprise ou d’un bien (par exemple, payer de l’intérêt sur un prêt hypothécaire accordé par le vendeur d’un immeuble locatif). Ici encore, il doit y avoir un lien direct entre le bien et la réalisation du revenu. (La déduction des intérêts est permise également dans quelques autres cas particuliers.)
  • Il n’est pas indispensable que l’argent emprunté, ou le bien, génère concrètement un revenu, ou un profit après déduction des dépenses. Il doit être utilisé avec l’intention d’en tirer un revenu. La Cour suprême du Canada a statué, dans le jugement Ludco (2001 CSC 62), que, dans le cas d’actions, il n’était pas nécessaire que la volonté de toucher des dividendes soit le but principal du placement; un but secondaire peut suffire. La Cour a également statué que l’intention de gagner un montant quelconque de revenu était suffisante, même à un taux inférieur à celui de l’intérêt payé.
  • Par le passé, l’intérêt payé sur de l’argent emprunté affecté à l’achat d’actions d’une société était toujours considéré comme déductible, puisque des actions peuvent toujours produire des dividendes. Dans l’arrêt Swirsky (2014 CAF 36), cependant, la CAF a refusé la déduction des intérêts sur un emprunt affecté à l’achat d’actions d’une société familiale, car la société n’avait aucun historique de dividendes et qu’en conséquence, il n’y avait aucune « expectative raisonnable de tirer un revenu des actions ».

Des règles spéciales de la LIR interdisent la déduction des intérêts sur des emprunts contractés pour certaines fins, telles des cotisations à un REER, un REEE ou un CELI. De même, des règles antiévitement spéciales empêchent la déduction des intérêts sur une « rente avec effet de levier » ou une police d’assurance-vie « 10-8 ». (Les contribuables ont utilisé ces structures avant 2013 pour tirer partie des règles relatives à la déductibilité des intérêts.)

Comme vous pouvez le voir, même si les règles paraissent simples, elles peuvent être difficiles à appliquer concrètement. Nous n’avons abordé ici que brièvement la complexité de la déduction des intérêts. Si vous souhaitez déduire des intérêts, assurez-vous que les fonds que vous empruntez sont affectés directement à la réalisation d’un revenu qui figure dans votre déclaration de revenus, auquel cas la déduction vous sera normalement accordée.

Mise à jour : 13 March 2020