Moore
Bulletin de novembre 2019

Si vous vendez ou transférez un bien à une personne ayant avec vous un lien de dépendance pour un montant autre que sa juste valeur marchande, des règles fiscales onéreuses peuvent s’appliquer. Ces règles sont décrites ci-après, et une exception est prévue pour les transferts à un conjoint (époux ou conjoint de fait). Mais, en premier lieu, qui est une personne ayant avec vous un lien de dépendance?

Dans le cas de particuliers, une personne ayant un lien de dépendance comprend toute personne qui vous est « liée » en vertu de la LIR, notamment par le sang, le mariage ou l’adoption. Sur la liste se retrouvent vos enfants, petits-enfants, arrière-petits-enfants, etc., vos parents, grands-parents, etc., vos frères et sœurs, votre conjoint et votre belle‑famille. Fait intéressant, on n’y retrouve pas vos cousins et cousines, oncles et tantes, neveux et nièces, mais bien un beau-frère et une belle-sœur (y compris par l’entremise d’une relation de fait).

Dans le cas de particuliers et de sociétés, une personne ayant un lien de dépendance comprend une société que vous contrôlez. Elle comprend une société contrôlée par un « groupe lié » dont vous faites partie (par exemple, une société que vous et votre conjoint contrôlez). Le contrôle d’une société s’entend en général de la propriété d’actions qui vous octroient plus de 50 % des droits de vote. Un « groupe » signifie deux personnes ou plus.

Dans le cas de sociétés, il existe un lien de dépendance dans diverses circonstances, dont les suivantes : si l’une contrôle l’autre; si elles sont contrôlées par la même personne ou le même groupe de personnes; si chacune des sociétés est contrôlée par une personne et que la personne qui contrôle l’une des sociétés est liée à la personne qui contrôle l’autre société; et si l’une des sociétés est contrôlée par une personne et que cette personne est liée à un membre d’un groupe lié qui contrôle l’autre société.

Ce qui précède est un bref résumé des règles relatives au lien de dépendance. Il existe diverses autres combinaisons et situations dans lesquelles des personnes peuvent être considérées comme ayant un lien de dépendance.

Les règles onéreuses

Si vous vendez un bien à un particulier ayant avec vous un lien de dépendance pour un montant inférieur à sa juste valeur marchande, vous êtes réputé avoir disposé du bien à la juste valeur marchande. Cependant, cette règle est à sens unique, en ce que le coût pour le bénéficiaire est le montant qu’il vous a payé pour le bien. Comme on peut le voir ci‑dessous, cette règle peut entraîner une double imposition.

Exemple

Vous détenez une immobilisation (comme des actions ou un immeuble) qui vous a coûté 10 000 $. Vous la vendez à votre sœur pour 20 000 $ à un moment où sa juste valeur marchande est de 50 000 $.

Vous aurez un produit réputé de 50 000 $ et, en conséquence, un gain en capital de 40 000 $, dont la moitié sera incluse dans votre revenu à titre de gain en capital imposable. Cependant, le coût du bien pour votre sœur sera de 20 000 $. Par conséquent, si elle revend alors le bien à un tiers (non lié) pour 50 000 $, elle aura un gain en capital de 30 000 $, lequel faisait déjà partie de votre gain en capital de 40 000 $.

En revanche, si vous achetez un bien d’une personne ayant avec vous un lien de dépendance pour un montant supérieur à sa juste valeur marchande, vous êtes réputé l’acquérir à un coût égal à sa juste valeur marchande. Mais, ici encore, cette règle est à sens unique, en ce que le vendeur aura un produit égal au montant quel qu’il soit que vous avez payé pour le bien.

Exemple

Votre sœur détient une immobilisation qui lui a coûté 10 000 $. Vous lui achetez le bien pour 50 000 $, à un moment où sa juste valeur marchande est de 20 000 $.

Le produit pour votre sœur sera de 50 000 $, ce qui lui procurera un gain en capital de 40 000 $, dont la moitié sera incluse dans son revenu à titre de gain en capital imposable. Le coût du bien sera toutefois pour vous la juste valeur marchande de 20 000 $. Si vous le revendez plus tard, par exemple, à un tiers non lié pour 50 000 $, vous aurez un gain en capital de 30 000 $, qui était déjà pris en considération dans le gain en capital de 40 000 $ de votre sœur.

Don d’un bien

Si vous donnez un bien à une personne, avec ou sans lien de dépendance avec vous, vous êtes normalement réputé avoir reçu un produit égal à la juste valeur marchande du bien. Dans ce cas, toutefois, le coût du bien pour le donataire est également réputé être la juste valeur marchande, et la question de la double imposition ne se pose pas.

Exemple

Vous détenez une immobilisation qui vous a coûté 10 000 $. Vous en faites don à votre sœur à un moment où sa juste valeur marchande est de 50 000 $.

Vous avez un produit réputé de 50 000 $ et, en conséquence, un gain en capital de 40 000 $, dont la moitié est incluse dans votre revenu à titre de gain en capital imposable.

Le coût du bien pour votre sœur est également de 50 000 $. Par conséquent, si elle le revend alors à un tiers (non lié) pour 50 000 $, elle n’aura aucun gain en capital et il n’y aura pas de double imposition.

Transfert à votre conjoint

Une exception s’applique aux ventes et dons de biens à votre conjoint (époux ou conjoint de fait). Elle s’applique également au transfert d’un bien à un ancien conjoint en règlement de droits résultant de votre mariage ou de votre union de fait (des obligations en droit de la famille, par exemple).

Dans d’autres cas, il y a « roulement automatique », ce qui signifie que votre produit de disposition est égal au coût du bien pour vous et que le bénéficiaire hérite de ce même coût du bien. Il n’y a donc pas alors d’impôt à payer sur le transfert.

Cependant, vous pouvez faire le choix de vous soustraire au roulement dans votre déclaration de revenus pour l’année du transfert. Si vous le faites, les règles décrites ci-dessus peuvent s’appliquer. En cas de perte, la déduction de celle-ci sera souvent refusée à titre de « perte apparente », sujet dont nous parlerons dans un bulletin de fiscalité ultérieur.

Enfin, si vous donnez de l’argent, ou si vous donnez un bien à une personne qui a avec vous un lien de dépendance ou le lui vendez pour un prix inférieur à sa juste valeur marchande, dans une année où vous devez une somme (impôt sur le revenu ou TPS/TVH) à l’ARC, et que vous ne réglez pas votre dette, l’ARC peut adresser un avis de cotisation à cette autre personne pour le montant de votre dette fiscale, et peut saisir ce bien ou d’autres biens que cette personne possède en règlement de votre dette fiscale.

Mise à jour : 14 November 2019