La taxe sur les produits et services (TPS) et la taxe de vente harmonisée (TVH) forment un système très complexe, comportant une myriade de règles et exceptions particulières. De nombreux détails ont changé depuis l’entrée en vigueur de la TPS en 1991.
Voici une bonne douzaine de règles singulières relatives à la TPS/TVH tirées de la Loi sur la taxe d’accise (LTA) – certaines moins connues que d’autres – qui pourraient avoir une incidence sur votre entreprise. À noter : alors que la TPS et la TVH sont administrées par l’ARC dans l’ensemble du Canada, elles le sont par Revenu Québec (RQ) au Québec.
- Cliniques médicales et autres cliniques de soins de santé. Lorsque les revenus sont partagés entre un médecin (ou autre professionnel de la santé) et une clinique, il arrive souvent qu’on ne sache pas clairement si la clinique paie le médecin pour les soins de santé (fourniture exonérée), ou si le médecin paie la clinique pour l’utilisation des installations de cette dernière (fourniture taxable). La réponse dépend à la fois des ententes contractuelles et des faits. (Voir la Politique P-238 de l’ARC.) Ces ententes doivent être soumises à l’examen attentif d’un expert de la TPS/TVH si l’on veut s’assurer que les taxes soient dûment calculées et remises par les bonnes parties. Sans cela, la surprise pourrait être désagréable (et coûteuse) si l’ARC ou RQ venait à auditer l’une ou l’autre entreprise!
- Services de soins de santé de nature esthétique. Une chirurgie esthétique (par exemple, redrapage du visage, blanchiment dentaire, élimination de taches pigmentaires au laser) est taxable à moins qu’elle ne soit exigée à des fins médicales ou reconstructives. Cette règle s’applique en fait à tous les services de soins de santé assimilables à des soins esthétiques. Par exemple, un service infirmier ou un service d’hygiène dentaire relatif à un traitement esthétique peut être taxable, même si ces services sont normalement exonérés.
- Les frais entre sociétés liées peuvent souvent être exemptés de TPS par la production d’un choix particulier (article 156 de la LTA, formulaire RC4616) auprès de l’ARC ou de RQ, mais seulement si ce choix vise simplement la suppression d’un flux de trésorerie. Ce choix ne doit pas entraîner une économie de taxe. Si l’une des sociétés effectue des fournitures exonérées comme des locations résidentielles ou des services de soins de santé (de telle sorte qu’elle ne peut se prévaloir de l’intégralité des crédits de taxe sur les intrants), les sociétés ne peuvent faire ce choix. De plus, si le choix a été fait avant 2015 au moyen de l’ancien formulaire GST25, il n’est plus valide et les sociétés risquent d’être imposées pour ne pas avoir perçu et remis la TPS/TVH. En outre, si deux sociétés appartiennent au même particulier, plutôt que d’être sous le contrôle commun d’une société, le choix ne peut être exercé et elles doivent se facturer la TPS/TVH entre elles.
- Ce ne sont pas tous les services de soins de santé qui sont exonérés. Ceux qui ne sont pas réglementés par au moins cinq provinces, ou couverts par une assurance santé publique dans au moins deux provinces, ne sont généralement pas sur la liste des fournitures « exonérées ». Par exemple, les services de massothérapeutes, de kinésiologues et d’homéopathes sont taxables, même s’ils sont réglementés par la province! (Une exception est prévue pour un « petit fournisseur », n’effectuant pas plus de 30 000 $ de fournitures taxables annuelles, qui choisit de ne pas s’inscrire au fichier de la TPS/TVH.)
- Les services sont habituellement taxés en fonction de l’adresse du client. Ainsi, en général, si un consultant en Ontario facture un client en Alberta, seule la TPS de 5 % s’applique, mais si un consultant en Alberta facture un client en Ontario, la TVH ontarienne de 13 % s’applique. Cette règle compte cependant de nombreuses exceptions. L’une d’elles vise les « services personnels » (par exemple les coupes de cheveux), qui sont taxés selon l’endroit où ils sont fournis, mais cette particularité exclut les « services professionnels» (avocat, comptable ou autre) normalement assujettis à la règle générale! Cette disposition peut donner des résultats surprenants. Par exemple, un hôtel ayant une installation thermale qui offre la massothérapie devrait vraisemblablement facturer la TPS/TVH en fonction de la province de résidence du client, si la thérapie est un service « professionnel ».
- Le vendeur d’un bien immeuble dont le prix inclut la TPS/TVH (s’il n’a pas pu demander un crédit de taxe sur les intrants au moment de l’achat du bien, pour diverses raisons) peut souvent récupérer cette TPS/TVH, par le biais d’un crédit ou d’un remboursement spécial de la taxe sur les intrants. Avocats, notaires et comptables qui conseillent des vendeurs omettent souvent de prendre en considération ces règles obscures, consignées aux articles 193 et 257 de la LTA.
- Si vous achetez un service ou un bien incorporel (par exemple un service de conseil ou un logiciel téléchargé) à l’extérieur du Canada, et qu’on ne vous facture pas la TPS/TVH, vous avez généralement une obligation légale d’autocotisation et de versement de la TPS/TVH à l’ARC, à moins que l’achat ne soit fait pour une entreprise qui demande l’intégralité des crédits de taxe sur les intrants de toute façon. On parle ici de « fourniture taxable importée». L’ARC n’a pas l’habitude de réclamer ces taxes aux consommateurs, bien qu’elle puisse le faire en loi. Cependant, si vous achetez une fourniture taxable importée aux fins de votre entreprise, et que vous n’êtes pas en mesure de demander des crédits de taxe sur les intrants (parce que vos ventes sont exonérées, par exemple), l’ARC ou RQ pourrait le découvrir lors d’un audit de votre entreprise et vous les réclamer.
- Si un mandataire inscrit au fichier de la TPS vend des produits pour un mandant qui n’est pas tenu de percevoir la taxe, il est considéré que ce mandataire a acheté et vendu le bien du mandant, et qu’il doit percevoir la TPS/TVH sur le prix complet facturé au client. Supposons, par exemple, que vous avez un bateau d’occasion (que vous avez utilisé pour votre propre agrément) que vous souhaitez vendre. Vous le confiez à un courtier en bateaux, qui le vend pour vous et prend une commission. Le courtier doit percevoir et remettre la TPS/TVH sur le prix complet de la vente (pas seulement sur la commission), même si vous n’auriez pas eu à le faire si vous aviez vendu le bateau vous-même.
- Si votre entreprise perçoit un « dépôt » auprès d’un client, aucune TPS/TVH ne s’applique tant que vous ne l’imputez pas à titre de « contrepartie » de l’achat. Cependant, à la lumière d’une décision de la CCI (Tendances et Concepts Inc., 2011), ce que vous croyez être un « dépôt » pourrait être en réalité un « acompte », auquel la TPS/TVH s’applique dès que vous avez encaissé la somme. De même, une fois que vous avez facturé un montant, l’entièreté de la TPS/TVH sur ce montant est normalement « exigible » et doit être versée pour la période de déclaration. Ces règles sont biscornues et, si vous ne les appliquez pas correctement, votre entreprise, lorsque l’ARC ou RQ la soumettra à un audit, se verra imposer pour ne pas avoir versé la TPS/TVH dans la bonne période de déclaration.
- Si vous vendez un immeuble commercial à un acheteur inscrit aux fins de la TPS, ce dernier constate normalement la TPS/TVH et demande habituellement en compensation un crédit de taxe sur les intrants, de telle sorte qu’il ne paie en fait aucun montant de taxe. Cependant la vente est toujours « taxable » aux fins de la TPS/TVH. En conséquence, si votre convention d’achat-vente précise que toute TPS/TVH est « incluse » dans le prix de vente, selon la province, vous ne recevrez que 100/105, 100/113 ou 100/115 du prix de vente à la conclusion de l’opération. Attention donc au libellé de la convention!
- La vente d’un terrain vacant est souvent exonérée lorsqu’elle est effectuée par un particulier, mais les exceptions sont nombreuses. Par exemple, si vous avez précédemment divisé le terrain en plus de deux parties, la vente sera taxable. Si vous avez loué le terrain, elle pourrait être taxable. Une vente par une société est presque toujours taxable. Si une ferme comporte une maison de ferme, la partie attribuable à cette maison (plus un demi-hectare de terrain) est habituellement exonérée. Ici encore, une foule de règles et d’exceptions sont prévues, et vous devriez demander l’avis d’experts pour vous assurer de bien faire les choses.
- Si votre entreprise poursuit une autre personne pour rupture de contrat, et que le contrat d’origine incluait la TPS/TVH, tout montant que vous recevez en dommages-intérêts ou en règlement sera normalement considéré comme incluant la TPS/TVH, de telle sorte que vous devrez remettre la taxe extraite du total et que le défendeur pourrait être en mesure de demander un crédit de taxe sur les intrants.
- Un musicien employé qui est également inscrit au fichier de la TPS peut souvent demander des crédits de taxe sur intrants pour la taxe payée sur l’achat d’instruments de musique utilisés dans le cadre de son emploi, en vertu d’une règle particulière du paragraphe 199(5) de la
Comme vous pouvez le voir, la TPS et la TVH sont fort complexes. Les mesures législatives et les règlements font des milliers de pages. Ce qui précède ne fait qu’effleurer cette complexité.