Règles générales
Une fiducie est un contribuable en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR), et elle est réputée, selon cette loi, être un « particulier », de sorte qu’elle doit produire une déclaration de revenus, sous réserve de nombreuses exceptions aux règles fiscales qui s’appliquent aux particuliers. Une déclaration spéciale est prévue pour une fiducie, la T3, et ses annexes pertinentes. Une succession (après un décès) est considérée comme une fiducie aux fins de la LIR.
Sous maints aspects, une fiducie calcule son revenu et son revenu imposable de la même manière que d’autres particuliers. Elle déterminera, par exemple, son revenu d’entreprise ou de biens, ou ses gains en capital imposables, en appliquant à peu près les mêmes règles que les particuliers. Une fiducie calcule son impôt à payer en appliquant le taux d’impôt pertinent à son revenu imposable.
Déduction et transfert du revenu aux bénéficiaires
Dans le calcul de son revenu, une fiducie peut normalement déduire tout revenu (y compris les gains en capital imposables) de l’année payé ou payable à un bénéficiaire. Ce montant entre alors dans le revenu de ce dernier.
En règle générale, le revenu que le bénéficiaire tire de la fiducie est considéré comme un revenu de biens générique.
Cependant, dans certains cas, la fiducie peut désigner un montant versé de telle façon qu’il conserve sa nature comme type de revenu spécifique pour le bénéficiaire.
Par exemple, si la fiducie verse un gain en capital imposable au bénéficiaire et procède à la désignation appropriée, le montant conserve sa nature comme gain en capital imposable pour le bénéficiaire. Ce transfert de nature peut être avantageux si le bénéficiaire a des pertes en capital, puisque ces pertes ne peuvent être déduites que des gains en capital et non des autres types de revenu.
De même, une fiducie peut désigner des dividendes imposables qu’elle a reçus et versés à un bénéficiaire de telle façon qu’ils demeurent des dividendes imposables dans les mains de ce dernier. Un bénéfi-ciaire qui est un particulier peut alors utiliser le mécanisme de la majoration et du crédit d’impôt pour dividendes qui s’applique aux dividendes reçus de sociétés canadiennes. Un bénéficiaire qui est une société canadienne peut déduire les dividendes dans le calcul de son revenu imposable.
Dans chaque cas, la fiducie doit remettre au bénéficiaire un feuillet T3 pour l’année, indiquant le montant et le type de revenu distribué au bénéficiaire.
taux d’impôt d’une fiducie
Une « fiducie » est normalement assujettie à un taux d’impôt uniforme correspondant au taux marginal le plus élevé, qui est actuellement de 29 % au fédéral. Si l’on ajoute les impôts provinciaux, le taux combiné devient d’environ 40 % – 50 % selon la province de résidence de la fiducie.
Cependant, comme nous l’avons vu ci-dessus, le revenu de la fiducie payé ou payable à un bénéfi-ciaire est normalement imposé entre les mains du bénéficiaire plutôt que de la fiducie. Un tel revenu sera évidemment assujetti aux taux progressifs s’appliquant au bénéficiaire. Jusqu’à la fin de 2015, une « fiducie testamentaire » est assujettie aux mêmes taux progressifs que les autres particuliers plutôt qu’au taux uniforme le plus élevé. De manière générale, une fiducie testamentaire est une fiducie qui s’ouvre au moment du décès, y compris une succession et toute fiducie constituée par testament.
Cependant, à compter de 2016, une fiducie testa-mentaire sera imposée au même taux uniforme que les autres fiducies. Deux exceptions sont prévues, en vertu desquelles les taux progressifs continueront de s’appliquer. La première exception est celle d’une « succession assujettie à l’imposition à taux progressifs », qui correspond essentiellement à la succession d’un défunt pour les 36 mois suivant son décès. La seconde exception est celle d’une « fiducie admissible pour personne handicapée », qui est généralement une fiducie testamentaire ayant un bénéficiaire handicapé qui a droit au crédit d’impôt pour personnes handicapées. Comme ci-dessus, le revenu de la fiducie payé ou payable à un bénéfi-ciaire sera assujetti aux taux d’impôt progressifs du bénéficiaire.
Choix possible lorsque la fiducie a des pertes reportées en avant
Comme il a été dit plus haut, le revenu d’une fiducie qui est distribué (payé ou payable) à un bénéficiaire est normalement déduit dans le calcul du revenu de la fiducie et inclus dans le revenu du bénéficiaire.
Cependant, une fiducie peut faire un choix spécial en vertu duquel ce revenu demeure le revenu de la fiducie plutôt que celui du bénéficiaire (même s’il a été distribué au bénéficiaire). Ce choix est utile lorsque la fiducie a des pertes reportées en avant, qui peuvent être déduites du revenu. Le bénéficiaire touche alors le revenu en franchise d’impôt, puisque celui-ci est imposé au niveau de la fiducie et non à celui du bénéficiaire.
Exemple
Une fiducie a un report en avant de perte d’entreprise inutilisé de 50 000 $ de 2013. En 2015, elle a 40 000 $ de revenu, qu’elle distribue à son bénéficiaire.
Pour 2015, la fiducie peut faire le choix spécial à l’égard des 40 000 $ distribués au bénéficiaire. Les 40 000 $ demeurent un revenu de la fiducie, mais ils peuvent être neutralisés par 40 000 $ de la perte reportée en avant de la fiducie (sur les 50 000 $ disponibles).
En conséquence, la fiducie n’aura pas de revenu imposable, et ne paiera pas d’impôt. De même, le montant de 40 000 $ distribué au bénéficiaire sera libre d’impôt pour ce dernier.
Note : À compter de 2016, ce choix spécial ne sera possible que si le revenu imposable de la fiducie est nul. Cela signifie, essentiellement, que la fiducie doit utiliser toutes les déductions possibles de la « Section C » de la LIR pour ramener son revenu imposable à zéro – le report en avant de pertes représentant la principale déduction de ce genre. Cette nouvelle règle n’aurait pas d’incidence sur l’exemple ci-dessus, puisque le revenu imposable de la fiducie, après déduction des pertes reportées, était nul.
Situations où un bénéficiaire est imposé sur un revenu conservé dans la fiducie
Dans deux situations, la fiducie obtient une déduction pour un revenu qu’elle ne distribue pas à un bénéficiaire et qui demeure donc dans la fiducie. Dans ces cas, le revenu est imposé entre les mains du bénéficiaire plutôt que de la fiducie.
Première situation : une fiducie a un « bénéficiaire privilégié ». Essentiellement, cela signifie un bénéficiaire handicapé qui est le constituant de la fiducie, l’époux ou le conjoint de fait du constituant, ou un enfant, petit-enfant ou arrière-petit-enfant du constituant.
La fiducie et le bénéficiaire privilégié peuvent, dans une année d’imposition donnée, faire le choix conjoint que toute partie du revenu de la fiducie pour l’année revenant au bénéficiaire soit incluse dans le revenu du bénéficiaire plutôt que de la fiducie. Ce choix peut être utile lorsque le taux d’impôt moyen du bénéficiaire est inférieur à celui de la fiducie, ce qui est souvent le cas.
Seconde situation : une fiducie a un bénéficiaire de moins de 21 ans. Dans ce cas, si le droit du bénéficiaire au revenu de la fiducie pour une année lui est « acquis » mais que le revenu ne lui est pas distribué dans l’année, il entre dans le revenu du bénéficiaire plutôt que dans celui de la fiducie. Le droit doit être acquis de façon inconditionnelle, ou à la seule condition que le bénéficiaire survive jusqu’à un âge ne dépassant pas 40 ans.
Acomptes provisionnels
Une fiducie est généralement tenue de verser des acomptes trimestriels, si son impôt net pour l’année d’imposition et l’une des deux années précédentes dépasse 3 000 $ (1 800 $ d’impôt fédéral pour les fiducies résidant au Québec).
Pour 2015, une fiducie testamentaire n’est pas tenue de verser des acomptes provisionnels. Toutefois, à compter de l’année d’imposition 2016, les fiducies testamentaires autres que les fiducies assujetties à l’imposition à taux progressifs (voir ci-dessus) seront tenues de verser des acomptes provisionnels.
Sans égard au type de fiducie, l’ARC a actuellement comme politique administrative de ne pas imposer d’intérêt ni de pénalité à une fiducie pour des acomptes impayés ou insuffisants, ce qui amène de nombreux fiduciaires à ignorer cette obligation de verser des acomptes provisionnels.
Année d’imposition
À compter de 2016, les fiducies devront avoir en général une année d’imposition qui coïncide avec l’année civile. Une fiducie assujettie à l’imposition à taux progressifs pourra toutefois utiliser une autre date de fin d’année d’imposition.