Moore
Bulletin de juin 2017

La Loi de l’impôt sur le revenu (LIR) donne à l’Agence du revenu du Canada (ARC) de larges pouvoirs d’accès à vos documents comptables, relevés bancaires et autres documents qu’elle peut trouver ou exiger.

Un vérificateur peut demander des documents vous concernant en s’adressant à vous ou à votre banque, votre comptable, votre employeur ou presque n’importe quelle autre personne avec laquelle vous faites affaire, comme des courtiers en valeurs mobilières, casinos, assureurs, clients ou émetteurs de carte de crédit.

En vertu de l’article 231.1 de la LIR, un contribuable doit se conformer à toute demande de vérification. Si la personne à laquelle on demande des renseignements ne se conforme pas à la demande, le vérificateur produira normalement une demande de renseignements en vertu de l’article 231.2. Il s’agit d’un document officiel, signifié à personne ou envoyé par courrier recommandé, qui oblige la personne à se conformer à la demande. Ne pas le faire est une faute pouvant donner lieu à une poursuite.

En pratique, si une personne ne se conforme pas à une demande de renseignements, l’ARC va plus loin et obtient de la Cour fédérale une ordonnance en vertu de l’article 231.7, qui est signifiée à la personne. La persistance de la non-conformité constitue un outrage au tribunal, qui conduit habituellement la personne en prison. Moyen très efficace d’assurer la conformité!

Ces règles ne prévoient que très peu d’exceptions. Dans la mesure où les documents ou dossiers demandés sont raisonnablement pertinents pour la vérification d’un contribuable, l’ARC a normalement le droit de les demander.

Une exception importante concerne les cabinets d’avocats (y compris les cabinets de notaires du Québec). Suite à la décision rendue en 2016 par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Chambre des notaires, l’ARC ne peut actuellement exiger des documents d’un cabinet d’avocats, même si ces documents ne sont pas protégés par le privilège des communications entre client et avocat.

Une autre exception concerne les documents visés par le privilège des communications entre client et avocat, même s’ils ne se trouvent pas dans le bureau de l’avocat. Ce privilège couvre les communications échangées avec un avocat dans le but d’obtenir un avis juridique. Cependant, si le document est entre les mains d’une autre personne – par exemple, dans le bureau de votre comptable – il peut y avoir eu renonciation à ce privilège et le document pourrait ne pas être protégé. Gardez soigneusement tous les documents protégés et, si des copies sont envoyées ailleurs, assurez-vous bien qu’il n’y a pas eu renonciation au privilège des communications entre client et avocat!

De plus, si le contribuable n’est pas identifié et que l’ARC veut utiliser les dossiers d’une entreprise pour retrouver les contribuables d’une certaine catégorie – comme tous les clients d’un conseiller fiscal donné ou tous les agents immobiliers payés par un courtier donné – elle doit obtenir une ordonnance de la cour avant de produire la demande de renseignements.

Enfin, si l’ARC est passée à l’interne d’une vérification à une enquête criminelle, elle ne peut exercer les pouvoirs décrits ci-dessus pour recueillir des renseignements en vue d’une poursuite, et les preuves réunies dans le cadre d’une demande de vérification, d’une demande de renseignements ou d’une ordonnance exécutoire ne seront pas admises en preuve dans la poursuite. (Elles peuvent néanmoins servir à étayer un avis de cotisation d’impôt et en preuve devant la Cour canadienne de l’impôt (CCI) en appel de cet avis de cotisation.) Cette règle, établie dans l’arrêt Jarvis de la Cour suprême du Canada de 2002, ne s’applique pas aux preuves réunies pendant que l’ARC procède uniquement à une vérification du contribuable et n’a pas entamé d’enquête criminelle.

De manière générale, vous devez présumer que tout document à votre sujet ou au sujet de vos activités financières qui existe à quelque endroit autre que le cabinet de votre avocat, peut être mis à la disposition de l’ARC.

Mise à jour : 15 June 2017