Une fiducie est une « personne » et un contribuable aux fins de l’impôt sur le revenu. En conséquence, elle sera assujettie à l’impôt sur le revenu sur son revenu imposable d’une année d’imposition. En revanche, si une partie ou la totalité du revenu de la fiducie pour l’année est « payée ou payable » à un bénéficiaire de la fiducie, la fiducie peut généralement déduire ce montant de son revenu, et c’est plutôt le bénéficiaire qui sera normalement assujetti à l’impôt à l’égard de ce revenu.
Dans presque tous les cas, une fiducie est considérée, en vertu de la LIR, comme un « particulier », comme un être humain. Quelques exceptions sont prévues toutefois.
Imposition de la fiducie sur le revenu non distribué
Le revenu gagné et non distribué d’une fiducie pour l’année d’imposition – c’est-à-dire, le revenu qui n’est pas payé ou payable à un bénéficiaire dans l’année – est normalement imposable pour la fiducie.
La plupart des fiducies sont assujetties à l’impôt sur leur revenu imposable à un taux uniforme égal au taux marginal le plus élevé qui s’applique aux particuliers. En ce moment, le taux fédéral est de 33 %; le taux provincial diffère selon la province. En général, le taux combiné fédéral+provincial est d’environ 50 % ou plus.
L’idée derrière le taux uniforme élevé est d’empêcher des particuliers de constituer de nombreuses fiducies et d’essayer de fractionner le revenu au regard des taux progressifs qui s’appliquent par ailleurs aux particuliers.
Deux exceptions sont prévues, en vertu desquelles les fiducies sont assujetties aux mêmes taux progressifs que ceux qui s’appliquent aux particuliers. En premier lieu, les taux progressifs s’appliquent à une « succession assujettie à l’imposition à taux progressifs », qui est en général la succession d’une personne décédée pour la période allant jusqu’à 36 mois après le décès (certaines conditions doivent être satisfaites). En second lieu, les taux progressifs s’appliquent à une « fiducie admissible pour personne handicapée ». Il s’agit en général d’une fiducie testamentaire (créée au moment du décès, normalement en vertu du testament de la personne décédée), dont le bénéficiaire est handicapé et a droit au crédit d’impôt pour personnes handicapées.
Imposition des bénéficiaires sur le revenu non distribué de la fiducie
Dans quelques cas, le revenu non distribué par la fiducie est imposé entre les mains d’un bénéficiaire plutôt que de la fiducie.
En premier lieu, cela peut se produire s’il y a un « bénéficiaire privilégié » en vertu de la fiducie et que la fiducie fait un choix au titre de bénéficiaire privilégié. Dans ce cas, le montant choisi est imposé entre les mains du bénéficiaire plutôt que de la fiducie. Ce choix peut entraîner une économie d’impôt si le taux d’impôt du bénéficiaire est inférieur au taux d’impôt de la fiducie (comme il a été mentionné plus haut, la fiducie paie en général le taux d’impôt marginal le plus élevé).
Un bénéficiaire privilégié doit soit avoir droit au crédit d’impôt pour personnes handicapées, soit être à la charge d’un autre particulier en raison d’une déficience physique ou mentale et avoir un revenu inférieur au montant personnel de base (12 069 $ pour 2019). D’autres conditions s’appliquent.
En second lieu, un bénéficiaire sera imposé sur le revenu non distribué de la fiducie qui n’est pas payé ou payable par ailleurs à un bénéficiaire de moins de 21 ans. Le bénéficiaire doit avoir un droit inconditionnel au revenu dans l’année (qui le plus souvent sera payé ultérieurement), même si ce droit peut être conditionnel à l’atteinte d’un certain âge ne dépassant pas 40 ans.
Dans l’un et l’autre cas, si le revenu est imposé entre les mains du bénéficiaire dans l’année courante, il peut être versé dans une année future en franchise d’impôt.
Imposition des bénéficiaires sur le revenu distribué
Dans la mesure où le revenu d’une fiducie est payable à un bénéficiaire dans une année d’imposition, il est normalement déductible pour la fiducie et inclus dans le revenu du bénéficiaire. En conséquence, il n’y a le plus souvent qu’un niveau d’imposition – soit celui de la fiducie, soit celui du bénéficiaire.
Le revenu est considéré comme « payable » dans une année s’il est payé au bénéficiaire dans l’année ou si le bénéficiaire a le droit d’en exiger le paiement dans l’année. Ce dernier point dépendra souvent des conditions de la fiducie.
La fiducie peut désigner certains types de revenu payé ou payable à un bénéficiaire pour préserver ou transmettre la nature du revenu.
Par exemple, la fiducie peut désigner les dividendes qu’elle a reçus de sociétés canadiennes et qu’elle reverse à un bénéficiaire comme étant des dividendes de même nature dans les mains du bénéficiaire. Un particulier bénéficiaire peut alors se prévaloir du crédit d’impôt pour dividendes, étant donné que ce revenu reçu de la fiducie est considéré comme un revenu de dividendes.
Une fiducie peut également désigner ses gains en capital imposables nets comme des gains de même nature pour le bénéficiaire, ce qui sera utile si le bénéficiaire a des pertes en capital (car les pertes en capital ne peuvent être déduites que des gains en capital). Si les gains en capital résultent de la disposition de biens admissibles à l’exonération des gains en capital, comme des actions admissibles de petite entreprise ou des biens agricoles ou de pêche, le droit à l’exonération passera au bénéficiaire à hauteur de son exonération cumulative restante.
Inclusion pour la fiducie là où le revenu est distribué au bénéficiaire
Une règle prévoit que la fiducie peut désigner son revenu payé ou payable à un bénéficiaire – qui serait autrement inclus dans le revenu du bénéficiaire comme nous l’avons vu ci-dessus – comme devant être inclus dans le revenu de la fiducie et non dans celui du bénéficiaire. Cette règle peut être utile si la fiducie a des pertes reportées en avant pouvant compenser l’inclusion dans le revenu, puisque le revenu peut être alors versé sans impôt au bénéficiaire.
Exemple
Une fiducie a 50 000 $ de revenu cette année, et 30 000 $ de pertes autres qu’en capital inutilisées d’années précédentes. Elle verse 50 000 $ à son bénéficiaire.
La fiducie peut déduire 20 000 $ du revenu versé au bénéficiaire, conservant 30 000 $ de revenu. Le montant de 20 000 $ est inclus dans le revenu du bénéficiaire.
La fiducie peut désigner le solde de 30 000 $ comme devant être inclus dans son revenu (et non dans celui du bénéficiaire), montant qui peut être annulé par le report de pertes autres qu’en capital de 30 000 $, laissant un impôt nul pour la fiducie. Le bénéficiaire reçoit le montant de 30 000 $ en franchise d’impôt.
Règles relatives à la disposition réputée
La plupart des fiducies personnelles sont assujetties à la règle dite de la « disposition réputée tous les 21 ans ». Cette règle prévoit la disposition réputée et l’acquisition à nouveau de presque tous les biens d’une fiducie à leur juste valeur marchande tous les 21 ans. La disposition réputée fait en sorte que les gains en capital accumulés ne peuvent être différés indéfiniment, même si les règles peuvent également engendrer des pertes en capital.
Quelques exceptions sont prévues selon lesquelles la disposition réputée se produit à un autre moment. Par exemple, en vertu de certaines fiducies au profit de l’époux ou conjoint de fait, la première disposition réputée se produit au décès du conjoint bénéficiaire. De même, pour une fiducie en faveur de soi-même (le plus souvent, une fiducie que vous avez constituée vous-même et dont vous êtes le seul bénéficiaire votre vie durant), la première disposition réputée se produit au décès du constituant.
Le revenu et les gains résultant de l’application des règles relatives à la disposition réputée sont assujettis à l’impôt entre les mains de la fiducie et non de celles du bénéficiaire.