Moore
Bulletin de janvier 2016

Dans les propositions du 18 juillet 2017 en matière d’impôt sur le revenu portant sur les questions fiscales propres aux petites entreprises (voir ci-dessus), l’une des principales modifications proposées concerne l’imposition du revenu de placement passif qu’une société privée sous contrôle canadien (« SPCC ») tire de l’utilisation de son revenu d’entreprise après impôt. En vertu des règles actuelles apparaît un avantage au titre de l’impôt reporté du fait que le taux d’imposition d’une entreprise exploitée activement par une SPCC (entre 11 % et 15 % selon la province) est sensiblement inférieur au taux d’imposition marginal le plus élevé qui s’appliquerait au particulier actionnaire (50 % ou plus). Même si le régime d’intégration de l’imposition des dividendes lève un impôt sur le particulier qui reçoit le dividende de telle sorte que le taux de l’impôt total est le même, le taux d’imposition inférieur initial des sociétés laisse à une SPCC un revenu beaucoup plus important qui peut être investi jusqu’à ce qu’il soit versé plus tard.

Le ministère des Finances a annoncé qu’il allait faire disparaître cet avantage fiscal, même si la modification n’allait s’appliquer qu’à une date ultérieure lorsque les modalités d’application en seraient publiées (vraisemblablement dans le budget fédéral de 2018). De manière générale, un nouvel impôt devait ainsi être levé sur le revenu de placement d’une SPCC de sorte que le taux le plus élevé de l’impôt combiné de la société et du particulier sur ce revenu serait bien supérieur au taux actuel – le plus souvent de l’ordre de 73 %.

Cependant, en octobre 2017, le ministère a reculé de quelques pas devant le tollé que cette annonce a suscité, et il a indiqué que la première tranche de 50 000 $ du revenu de placement passif annuel d’une SPCC (représentant un rendement de 5 % à hauteur de placements de 1 M $) ne serait pas assujettie aux nouvelles propositions.

Il sera donc toujours avantageux – dans une certaine mesure – de réaliser un revenu passif dans votre SPCC. Vous n’auriez pas cet avantage si vous exploitiez plutôt votre entreprise personnellement ou par l’entremise d’une société de personnes. L’exemple ci‑dessous illustre les économies d’impôt encore possibles.

Exemple

Supposons :

  • un taux d’impôt personnel de 50 %;
  • un taux d’impôt de 13 % sur le revenu tiré d’une entreprise exploitée activement par une SPCC;
  • un «impôt remboursable » de 50 % sur le revenu de placement passif d’une SPCC;
  • une « intégration » parfaite de l’impôt des particuliers et de l’impôt des sociétés, ce qui signifie que le total de l’impôt des sociétés et des particuliers sur le revenu d’une SPCC qui est versé par la suite en dividende à un actionnaire est égal au taux d’impôt marginal de l’actionnaire de la SPCC;
  • 500 000 $ de revenu d’entreprise; et
  • un taux de rendement de 10 % sur les placements passifs.

Le contribuable 1 exploite personnellement une entreprise, dont il tire un revenu de 500 000 $ dans l’année 1, ce qui lui laisse 250 000 $ après l’impôt de 50 % (250 000 $). Il investit le montant après impôt au début de l’année 2, ce qui lui rapporte 25 000 $ à la fin de l’année 2. Le montant de 25 000 $ est assujetti à l’impôt de 50 %, ce qui laisse 12 500 $. Le contribuable 1 se retrouve avec un total de 262 500 $ (250 000 $ plus 12 500 $).

Le contribuable 2 exploite, par l’entremise d’une SPCC, une entreprise ayant un revenu de 500 000 $ tiré d’une entreprise exploitée activement dans l’année 1, ce qui lui laisse 435 000 $ après un impôt de 13 % (65 000 $). Ce montant, qui est investi au début de l’année 2, rapporte 43 500 $ au terme de l’année 2, alors que le montant maximal est versé en dividende à l’actionnaire, le contribuable 2. En supposant une « intégration » parfaite de l’impôt des particuliers et de l’impôt des sociétés, le revenu de placement de 43 500 $ sera assujetti à un impôt total de 50 % (impôt remboursable de la SPCC déduction faite du remboursement, plus l’impôt personnel sur les dividendes), ce qui laissera 21 750 $. La part de 435 000 $ du dividende sera assujettie à un impôt additionnel de 185 000 $ dans les mains du contribuable 2 (c’est-à-dire que l’impôt de 185 000 $ plus l’impôt initial de 65 000 $ de la SPCC est égal à 50 % du revenu d’entreprise de 500 000 $), ce qui laissera 250 000 $. Au total, le contribuable 2 se retrouve avec 271 750 $ (250 000 $ plus 21 750 $).

Dans cet exemple, le contribuable 2 a un avantage significatif sur le contribuable 1, du fait du report d’impôt effectif sur une grande partie du revenu d’entreprise de 500 000 $. Considérant que la SPCC a été assujettie au départ à un impôt de 13 % seulement comparativement au contribuable 1 qui a été assujetti à un impôt initial de 50 %, la SPCC avait une « longueur d’avance » quant au montant qu’elle pouvait investir. (L’exemple suppose une parfaite intégration de l’impôt des particuliers et de l’impôt des sociétés. Dans la plupart des provinces, cette intégration est actuellement moins que parfaite pour le revenu de placement d’une SPCC. Le contribuable 2 pourrait se retrouver avec moins de 271 750 $, mais il aura certainement plus que les 262 500 $ du contribuable 1.)

Bref, les propriétaires d’entreprise qui exercent leurs activités par l’entremise d’une SPCC en retirent des avantages fiscaux importants par rapport à ceux qui exploitent l’entreprise personnellement. En plus du taux d’imposition du revenu de petite entreprise dont bénéficient les SPCC, il y a l’exonération cumulative des gains en capital pour les actions admissibles de petite entreprise et, comme on l’a illustré ci-dessus, un avantage lié au fait de gagner un revenu de placement passif.

Mise à jour : 12 January 2018